Ça c’est du poisson ! Ce solitaire massif croisé sous un surplomb rocheux ou dans la boue des estuaires en impose sur les photos. C’est pourquoi il a été la cible privilégiée de la pêche sportive pendant des décennies, avant d’être protégé, pour le bonheur des yeux (ou du photographe respectueux) lors de la rencontre.
1 – Bien en chair
Un itajara est bien baraqué, 300 kg robustes pour environ 2 mètres de long, avec une grosse tête bien lippue, si grosse que les yeux en paraissent petits. Ce corps brun jaunâtre, grisâtre ou verdâtre est paré de bandes verticales sombres vers la queue et de tâches noirâtres dispersées sur la tête.
2 – Sédentaire adulte
En bon solitaire qui ne bouge pas beaucoup, un Goliath d’Atlantique reste souvent près de son creux (épave, trou, recoin du récif de 0 à 50 mètres de fond) et se nourrit des proies passant à sa portée, y compris les tortues broyées par sa dentition ou les raies ! Mais il se concentre surtout sur les pieuvres et crustacés cachés pour pouvoir dîner en déployant le moins d’efforts possibles.
3 – Baladeur jeune
La larve de l’itajara a pu dériver dans les courants de l’Atlantique tropical avant de se fixer à faible profondeur dans les mangroves ou estuaires : l’espèce se retrouve ainsi en Afrique et en Amérique centrale, jusqu’au sud du Brésil. Enfin, plutôt « était présente » : 95 % de la population a disparu du fait de la pêche et de la destruction de son environnement par l’urbanisation !
4 – Âge mature
On suppose que, comme tous les autres mérous, cette espèce est « hermaphrodite séquentielle » : femelle jeune puis mâle âgé. Les jeunes femelles atteignent maturité vers 6 ans (1 m 25), donc tard, selon l’étude de leurs rayons, otolithes (os du crâne) et écaille. Alors que certains mâles du même âge ont été observés, les vieux ne sont, eux, que des mâles…
5 – Rassemblements
Une fois par an, les mâles et femelles se regroupent pour la période de frai. Mais cela reste à confirmer par des observations plus fréquentes ! Du fait de la rareté de l’espèce, malgré le fait qu’ils parcourent des centaines de kilomètres pour se retrouver, ces rassemblements reproducteurs ne comptent qu’une quarantaine d’individus.
6 – Aliment pour chat
Ce poisson a été surpêché, mais pas pour son goût assez plat. La pêche de loisir, du fait de sa taille, a été massive dans les années 1970-80… pour que ces prises énormes soient jetées, laissées moisir ou données aux chats ! Alors qu’aujourd’hui, médiatisation oblige, les prises accidentelles (avec sa rareté actuelle) sont considérées mets de choix. Incompréhensible !
7 – Masse chasseuse
Petit, c’est un repas de choix pour les requins avant qu’il ne soit assez gros. D’apparence placide, la puissance de sa queue lui permet de courser ses proies. Mais ce n’est même pas nécessaire : avec la seule dépression causée par l’ouverture de sa gueule, les petites proies sont avalées en un instant.
8 – GoliathS
Certains plongeurs du Pacifique soutiennent qu’un Goliath est vert avec des pois brun-rouge… C’est un mérou Goliath du Pacifique (Epinephelus quinquefasciatus) qu’ils décrivent ! D’où l’utilisation commune de « itajara » par les locaux.
9 – Territorial
Un itajara est fidèle à sa tanière, qu’il défendra au point de mordre les approchants, s’ils n’ont pas déjà été repoussés lorsqu’il a ouvert la bouche pour montrer sa bonne dentition tout en dardant ses rayons de nageoire dorsale. Ses yeux globuleux nous suivant préviennent : attaquer est fatiguant mais arrivera si nécessaire…
10 – Bang
Un mérou Goliath d’Atlantique est tellement gros qu’il peut émettre des vibrations si puissantes qu’elles sont perçues comme des passages du mur du son en plongée ! Est-ce une excuse pour en ré-autoriser la pêche en Floride ? Ce gros chasseur flemmard n’est pas un concurrent : il assainit le milieu en se nourrissant des poissons malades ! Décision prévue en 2022…
Jérémy Delille