Il y a 8 mois, le plongeur biologiste Laurent Ballesta et ses trois coéquipiers Antonin Guilbert, Thibault Rauby et Yanick Gentil ont passé 28 jours confinés dans une station bathyale où ils ont pu, pour la première fois, plonger à saturation en recycleur. Découvrez le bilan scientifique et humain de cette aventure ainsi que les premières images du film Planète Méditerranée.*
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Un bilan scientifique prometteur
À l’issue des 31 plongées effectuées lors de cette expérience, les observations des plongeurs ont permis plusieurs découvertes :
- Une trentaine d’observations inédites de comportement ou d’espèces a été réalisée : barbier perroquet, morue cuivrée, cardine tachetée, parades nuptiales des murènes…
- Le cycle de vie et la température maximale de résistance (26°C) de l’espèce de laminaire endémique de Méditerranée (Laminaria rodriguezii) ont été déterminés.
- La contamination chimique des sédiments a été déclarée globalement faible mais tous les sites sont contaminés aux PCB.
- Une centaine d’espèces de poissons ont été détectées à travers leurs traces ADN dans l’eau à la fois dans les différentes zones du Parc national des Calanques et en dehors. En revanche, des traces de certaines espèces commerciales telles que l’espadon, la raie violette ou le barracuda, ont été détectées en zone interdite de pêche alors qu’elles ne l’on pas été ailleurs.
- Les caractéristiques physiques des sites sont publiées et disponibles ici. Les résultats ont relevé des températures en moyenne 2 à 3°C supérieures à la moyenne. Preuve que la Méditerranée se réchauffe 20% plus rapidement que les océans.
- Contrairement aux autres sites profonds connus, la population incroyable de corail noir au large de La Ciotat se compose de colonies femelles et mâles permettant une reproduction sexuée et asexuée (par fragmentation).
Quel impact sur les plongeurs ?
Quatre plongeurs enfermés pendant 28 jours dans 5 m² à respirer un mélange d’hélium et d’oxygène (2%) à 13 bars de pression… L’impact sur leur métabolisme a été étudié. Ils présentaient à la sortie un état nutritionnel et une hydratation jugés bons et stables grâce à l’attention portée aux plongeurs et malgré les fortes chaleurs.
Les chutes de masse musculaire attendues n’ont pas été observées à l’exception d’un plongeur (- 3 %) habitué à un entraînement physique intense. Les impacts toxiques sur les poumons sont légers et correspondent aux effets attendus. Les bulles de gaz en circulation relevées au retour des plongées sont négligeables. Les changements de microbiote sont en cours d’analyse.
Ce bilan positif permet d’envisager d’utiliser cette technique pour une étude complète pluridisciplinaire autour de l’épave du Natal à -120 mètres prochainement.
* Le film Planète Méditerranée sera diffusé à l’automne 2020 sur Arte.