L’Estartit est la porte de l’archipel des îles Medes, protégé, composé de 7 îlots situés à un mille à peine de navigation du village. Parfois victime de son succès, c’est en tout cas une reconversion réussie pour le petit port de pêche.
Tout commence en 1983, avec la création d’une réserve visant à interdire le prélèvement de corail rouge et la pêche sur les îles. Depuis, une idée astucieuse a été mise en place afin de contenter à la fois la plongée et la petite pêche : les postes de capitaine de bateau de plongée sont réservés aux pêcheurs, avec un salaire mensuel fixe, sans qu’ils perdent leur droit de pêche sur la zone. De quoi améliorer les fins de mois.
Et très vite, dès 1990, les pêcheurs se sont rendu compte qu’ils prenaient plus de poissons aux abords de la réserve, à la fois en termes de nombre d’espèces et de taille des individus capturés. C’était la preuve, sur le terrain, de “l’effet réserve”. Les premières lois de protection des îles ont alors été promulguées, avec un suivi scientifique assuré par l’université de Barcelone.
Limiter le nombre d’usagers
Des règles de fonctionnement ont été définies afin de permettre la coexistence harmonieuse de quatre catégories d’usagers, avec l’accès à des bouées différenciées et des contrôles quotidiens : les centres de plongée professionnels, les plongeurs individuels venant avec leur propre embarcation, les plaisanciers et les bateaux à fonds de verre.
Par exemple, si vous souhaitez plonger sur les îles avec votre bateau, il suffit de réserver le site souhaité en montrant les cartes de brevet des plongeurs. Après paiement du droit de plonger, une autorisation vous est délivrée avec une heure d’entrée sur zone et une heure de sortie. En cas de contrôle, l’autorisation et les cartes de brevet sont demandées.
Les centres professionnels, limités pour l’instant à 65 000 plongées par an, établissent une déclaration pour chaque sortie avec les noms et qualifications des plongeurs et doivent s’acquitter du paiement d’un droit : 4,65 € par plongée en scaphandre, 2,85 € par snorkeler.
Évidemment, ce nombre limité ne permet pas de satisfaire la demande. Au cours d’un séjour, les centres s’arrangent donc pour prévoir une moitié des plongées sur “les îles” et l’autre “à la côte”. Il faut alors savoir adapter son regard et ses exigences, éviter la re-cherche du toujours plus et prendre conscience de la différence entre des zones protégées et des zones qui ne le sont pas.
Les épaves de L’Escala
Sur L’Escala, les deux sites de plongée les plus intéressants sont les épaves du Reggio Messina et du Marmoler.
- Le Reggio Messina est un ferry de 132 m de long, immergé en 1989 par la Direction générale des Pêches dans le but d’en faire un site de plongée. L’épave, située dans une zone peu protégée, a été brisée en trois parties par les tempêtes. Les congres y ont élu domicile. La plongée se déroule entre 20 et 35 m. Il est déconseillé d’y pénétrer du fait de la grande quantité de sédiments sur le fond, au risque de troubler l’eau au moindre coup de palme.
- Le Marmoler, de son vrai nom le Avvenire, est un cargo de 47 m de long qui a coulé en 1971 à cause de son lourd chargement de marbre (mármol, en espagnol). Il repose sur 42 m, ce qui réserve cette plongée à des plongeurs expérimentés.
Ces deux épaves sont accessibles depuis L’Escala et L’Estartit.
Alain Foret
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4 plongées exceptionnelles autour de l’Estartit
- Tascó petit qui forme un triangle d’îlots avec Tascó gros et Carall Bernat est l’une des plongées les plus riches. Les mérous sont au rendez-vous avec souvent, en pleine eau, un grand banc de sphyrènes. Autres espèces rencontrées : dentis, corbs, dorades royales, bancs de saupes et loups, voire même des raies. Cette plongée, qui se déroule entre 0 et 20 m, ne présente aucune difficulté. Même lorsqu’il y a du courant, il est toujours possible de s’abriter derrière des roches. Un must.
- Différente, un peu plus technique, la grotte de La Vaca, sur 25 m et plus, permet de voir de superbes gorgones et des langoustes, en plus de la faune habituelle.
- El Dofí (dauphin) est l’occasion d’une plongée unique dans des tunnels qui traversent la roche pour entrer d’un côté de l’îlot et en ressortir de l’autre (0-25 m). Sensations garanties. Réservée à des plongeurs expérimentés.
- Sur la côte : Puig de la Sardina, de gros blocs et un piton rocheux qui s’étendent de 36 à 14 m et concentrent la vie marine.
Les poulpes de Dalí
Nous sommes en 1973. Par fort vent d’Est, Jean-Louis Galy, pêcheur sous-marin, met à l’eau son pneumatique à Portlligat. Un homme l’interpelle. Il croit d’abord que ce sont des contrôleurs, la pêche étant alors extrêmement réglementée en Espagne. Il n’en est rien. C’est un homme avec une sorte de robe de chambre qui lui crie :
– Poulpes ?
– Non, pas de poulpes.
Le dialogue s’engage. L’homme aurait besoin de quelques poulpes. Jean-Louis sait que les pêcheurs du coin mettent des pneus dans le port pour pêcher les poulpes. Il s’immerge et en remonte un. L’homme tourne les talons et revient avec une bassine en fer blanc et un grand drap qu’il étale sur la plage. Il demande d’autres poulpes. Jean-Louis s’exécute… et voit alors que l’homme prend ses poulpes, les trempe dans de la peinture noire et les balance sur le drap blanc. Tant bien que mal, ils repartent ensuite à la mer en laissant derrière eux une trainée noire ! Ce n’est que des années plus tard que Jean-Louis s’est rendu compte que ce devait être Dalí. En 1973 – l’année coïncide – il a peint un portrait de Beethoven à l’aide d’encre de poulpe ! La toile est exposée au musée de Figueras. Était-ce vraiment lui ? Qui pouvait être suffisamment fou à Portlligat, en 1973, pour demander des poulpes par fort vent d’Est, en robe de chambre, et les jeter sur un drap blanc ? Une tentative d’essai avant son tableau final, qui sait ?