
Les Otariidés au Cœur de Recherches Scientifiques – Dossier Otaries
Quel est l’impact des changements environnementaux sur les populations d’otaries ? Comment communiquent-elles et se reconnaissent-elles au milieu de la colonie ? Pour répondre à ces questions, des chercheurs se rendent sur les Terres australes, en Alaska, en Afrique du Sud, en Australie ou encore au Pérou. Suivez-les au cœur des colonies et découvrez les mystères que ces fascinants animaux marins dévoilent.
Saint-Paul et Amsterdam, Crozet, Kerguelen…

Ces îles, éloignées de toute activité humaine, abritent un trésor de biodiversité. Les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) sont un véritable sanctuaire, reconnu par l’UNESCO et classé comme la plus grande réserve naturelle de France. Ce territoire exceptionnel concentre la plus importante population d’oiseaux marins au monde, ainsi qu’une des plus vastes populations de mammifères marins. Parmi eux, on trouve les otaries à fourrure subantarctiques (Arctocephalus tropicalis), également appelées otaries d’Amsterdam, et les otaries à fourrure antarctiques (Arctocephalus gazella), ou otaries de Kerguelen.
Toutes ces espèces sont étudiées depuis plus de 60 ans dans le cadre du Programme 109, un projet de recherche de l’Institut polaire français Paul-Emile Victor (IPEV), mené par l’équipe «Prédateurs marins» du Centre d’études biologiques de Chizé (CEBC). Ce programme se consacre au suivi démographique à long terme des prédateurs supérieurs (albatros, manchots, otaries…) dans les TAAF. Ces animaux, véritables sentinelles des changements environnementaux, sont observés attentivement afin d’identifier leurs réactions face à ces bouleversements au fil des années. L’objectif ultime du programme est de prévoir les effets des changements globaux futurs et de proposer des mesures de conservation adaptées pour ces espèces vulnérables.
Un Suivi Attentif des Mères et des Petits
Chaque année, des volontaires sont envoyés sur les trois districts des TAAF (voir encadré) pour effectuer le suivi des populations d’oiseaux et de mammifères marins. Ils reviennent avec une quantité importante de données précieuses, destinées notamment à des institutions internationales telles que l’IUCN. Les otaries sont principalement étudiées sur l’île d’Amsterdam.

“C’est là que le plus gros du travail se fait, explique Tiphaine Jeanniard-du-Dot, chargée de recherche au CEBC. Nous suivons des individus, connaissons leur âge, le nombre de petits qu’elles ont, leur taux de reproduction, la survie de leurs petits…” Pour ce faire, les animaux sont bagués et/ou pucés dès leur plus jeune âge, permettant ainsi un suivi tout au long de leur vie. Ces données sont cruciales, car les relations mère/petit sont intimement liées aux changements environnementaux.

Au moment de la reproduction, les mères mettent bas. Contrairement aux phoques qui disposent de réserves énergétiques importantes, les otaries ont très peu de graisse et doivent impérativement retourner en mer pour refaire leurs réserves afin de pouvoir nourrir leur petit. “Mais elles sont limitées, en termes de temps passé en mer, par la capacité de jeûne du petit” précise la chercheuse. Un équilibre délicat, menacé par les aléas climatiques.
Une Capacité d’Adaptation Étonnante
Pour étudier spécifiquement les impacts des changements environnementaux sur la disponibilité des proies, Tiphaine Jeanniard-du-Dot a mené en 2012 une étude sur les deux espèces d’otaries les plus septentrionales, et donc les plus vulnérables face au réchauffement climatique : les otaries à fourrure d’Alaska (Callorhinus ursinus) et les otaries de Kerguelen.

En Alaska, l’étude a révélé deux stratégies distinctes chez les femelles. Certaines choisissaient de s’éloigner de la colonie pour trouver des poissons à forte valeur énergétique, laissant leur petit plus longtemps à terre. D’autres préféraient rester à proximité de la colonie, ramenant des poissons moins nutritifs et plus difficiles à capturer.
“Il faut savoir qu’en Alaska, 20 ans plus tôt, elles n’avaient pas à faire ce choix », ajoute Tiphaine Jeanniard-du-Dot. Certaines mères laissaient donc leur petit plus longtemps, mais revenaient avec beaucoup de lait, tandis que d’autres revenaient plus fréquemment, mais avec un lait moins nourrissant. “Finalement ces deux stratégies ont à peu près le même impact sur les petits, conclut-elle. En revanche, par rapport aux otaries de Kerguelen qui, elles, n’avaient pas du tout à faire de compromis, on a vu une différence sur la croissance du petit pendant la période de lactation, sachant que la taille et le poids pendant le sevrage sont directement liés à la capacité de survie du petit. Moins de petits signifie sur le long terme une population qui décline”.
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